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Fort-de-France, chef-lieu de la Martinique.

Cette commune située sur la côte Caraïbe possède un magnifique espace vert s’étendant sur cinq hectares. Lieu de référence et lieu de repos, la place de La Savane est surtout un lieu historique que nous vous invitons à connaître.

 

 

  • Naissance d’un haut lieu de la vie sociale foyalaise

Au XVIII siècle, la place de La Savane n’était qu’un terrain vague utilisé par les soldats de la garnison du Fort Saint-Louis, pour s’exercer. Les années passèrent et ce terrain vague devint un lieu de promenade, de détente et de rencontre. En 1830, la place se transforma en « jardin du Roi Louis-Philippe », elle est réaménagée et une multitude d’espèces végétales y sont plantées. Vingt-neuf ans plus tard (1859), Vital Dubray (sculpteur français né le 27 février 1813 à Paris) y installa, au centre, une statue en marbre de l’impératrice Joséphine. Celle-ci regardait vers les Trois Ilets (sa commune natale) et une dizaine de palmiers royaux étaient plantés tout autour d’elle, formant comme une haie d’honneur. Aujourd’hui, la statue de l’impératrice Joséphine a été décapitée.

 

Mais continuons notre histoire… En 1891, un terrible cyclone fit des ravages à Saint-Pierre et Fort-de-France. La place de La Savane ne fut pas épargnée, et ce fut dans un décor chaotique qu’on la retrouva pour la restaurer progressivement puis l’agrandir en 1935. C’est également à cette même date, 1935, que fut érigé le bronze de  Pierre Belain d’Esnambuc (premier colon d’origine normande installé en Martinique).

 

Aujourd’hui, la place a retrouvé sa fonction première et est redevenue un des lieux majeurs de la vie à Fort-de-France. Un espace de promenade, de détente et de rencontre autour duquel sont organisés divers évènements culturels, festifs et militaires.

 

*** La place a rouvert ses portes en 2011, suite à de lourds travaux entamés après le passage du cyclone « Dean » en 2007. ***

 

 

  • Les faits marquants de la place de La Savane

Haut-lieu de grandes manifestations, la place de La Savane a accueilli de nombreux évènements et personnages publics importants.

 

Aimé Césaire y prononce son discours nommé « le combat de Victor Schoelcher continue… », le 21 juillet 1951. Ce discours traite du colonialisme et du mythe Schoelcher. Il y dénonce ce Schoelcherisme que le peuple martiniquais n’a cessé de faire, en s’identifiant aveuglement à un homme que nos ancêtres ont trop idéalisé.

 

 

« On a trop vite identifié Victor Schœlcher à l’idéaliste qu’effectivement il porte en lui. Par là, il est de son temps, et l’emploi dans son œuvre des mots « Droit, Justice et Liberté », ornés comme d’entités métaphysiques de la capitale protocolaire, en sont les signes les plus extérieurs. Mais endormeur, lénifiant, mystificateur, son honnêteté lui interdit de l’être jamais, et par là, le combattant d’aujourd’hui qui se veut lucide, le sent extraordinairement proche.

Je vois bien ce qui lui manqua : de n’avoir pas épuisé l’analyse de la notion même de la colonisation ; de n’avoir pas vu qu’elle recelait, préformés, tout l’arbitraire, toute l’injustice, toute l’exploitation de l’homme par l’homme, et la discrimination raciale, et le sadisme et la barbarie.

Et je vois un autre manque : que Schoelcher ramenant le problème colonial à un problème social, en méconnaît un aspect, qui est d’être un problème national…»

Extrait du discours d’Aimé Césaire, prononcé à la place de La Savane le 17 juillet 1951. Ce discours est disponible, dans son intégralité, sur le site « lyceeschoelcher.blog4ever.com ».

 

 

 

De nombreux présidents se rendent à la place de La Savane, lors de visites présidentielles. Nous pensons à Charles de Gaulle, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy ou encore François Hollande. Les personnalités politiques locales ont également l’occasion de franchir ce lieu lors de manifestations diverses telles que : la cérémonie d’intronisation (dernière en date, celle du nouveau préfet de la Martinique Franck Robine, qui a eu droit à une cérémonie des honneurs militaires), la cérémonie commémorative du 11 novembre, la cérémonie du 8 mai 1945, la cérémonie d’hommage aux morts pour la France, etc.

 

C’est également un lieu de manifestation sociale. Rappelez-vous le 23 août 2017, la MIR Martinique avait organisé un rassemblement sur La Savane, pour manifester « faces aux symboles des suprématies blancs du colonialisme français en apologie de leurs crimes racistes esclavagistes en Martinique ».

Cependant, la plus marquante des manifestations est celle de décembre 1959. Trois nuits d’émeute à Fort-de-France (20, 21 et 22 décembre) et la mort de trois jeunes martiniquais.

 

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20 décembre.

20h, suite à un accident (sans gravité) entre un cyclomotoriste martiniquais et un automobiliste métropolitain, une bagarre éclate et une foule se forme. Les choses se calment assez rapidement, lorsque les protagonistes arrêtent la bagarre. Malheureusement, un appel téléphonique bouleversera la suite de cette soirée…

Les CRS débarquent et tentent de disperser la foule avec des grenades, coups de matraque et gaz lacrymogène. Un tel acharnement qui ne plait pas à tous, provoquant la colère d’une partie de la population qui tente de se défendre en lançant des projectiles.

 

21 décembre.

La situation s’aggrave. Les CRS provoquent, abusent de leur pouvoir et la population ne se laisse pas faire. La petite bagarre se transforme en émeute générale et les manifestants incendient les bâtiments symbolisant l’ordre colonial et l’État français. Ils pensent que les nostalgiques du temps des colonies sont de complicité avec les CRS. Les vitres des commerces de luxe et des nouveaux magasins sont brisées. Les voitures de police sont jetées dans le Canal Levassor. C’est un véritable conflit entre la jeunesse révolté et la police.

Ce carnage fera deux victimes, Christian Marajo, jeune lycéen de 16 ans et Edmond Eloi Véronique, ouvrier maçon de 20 ans.

 

22 décembre.

Les morts de la veille n’arrangent rien, la population est de plus en plus mécontente. Les magasins sont pillés, les voitures brulés, les combats redoublent.

Ces trois jours d’émeute se finalisent avec la mort de Julien Betzi, ouvrier électricien de 19 ans.

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Conclusion

Au delà des manifestations politiques ou sociales, cette place historique est remplie de souvenirs. Véritable lieu culturel, La Savane propose à sa population de nombreux concerts et autres événements culturels (parade, carnaval, manifestations environnementales, santé…).

Lieu mythique de la vie à Fort-de-France, cette place a évolué et continuera d’évoluer pour le plaisir des jeunes et moins jeunes.

 

Le « Foyal Mizik Show », 2017, La Savane